Introduction
Les importantes réserves d’or du Ghana, autrefois symbole de la richesse nationale, sont aujourd’hui menacées par une source inattendue : l’exploitation minière illégale à petite échelle, connue localement sous le nom de galamsey. Mais à quel prix cette industrie souterraine continue-t-elle de prospérer ? Alors qu’elle promet des profits rapides à certains, elle a déclenché une vague de destruction de l’environnement qui pourrait avoir des conséquences considérables.
Comment une nation riche en ressources naturelles peut-elle être confrontée à une crise de l’eau ? Il est alarmant de constater qu’environ 60 % des masses d’eau douce du Ghana ont été contaminées, souvent de manière irrémédiable, principalement en raison d’activités minières non réglementées. Ces eaux polluées mettent en danger la santé des communautés qui en dépendent pour la boisson, l’agriculture et la pêche (Nti et al., 2023).
En outre, les cicatrices sur la terre sont indéniables. Les opérations de Galamsey ont privé de vastes zones de leur couverture forestière, accéléré la déforestation et entraîné une grave érosion des sols. Que se passe-t-il lorsque le sol sous lequel nous vivons perd sa capacité à entretenir la vie ? L’effondrement des écosystèmes entraîne une diminution de la biodiversité et la disparition d’habitats autrefois florissants (Awewomom et al., 2024).
L’utilisation généralisée de produits chimiques toxiques tels que le mercure dans l’extraction de l’or est peut-être la plus préoccupante. Ces substances empoisonnent non seulement la vie aquatique, mais posent également des risques sanitaires à court et à long terme pour les populations locales, car l’intoxication dépasse largement les limites de sécurité établies par l’Organisation mondiale de la santé (Awewomom et al., 2024 ; hrw.org). Le gain à court terme peut-il jamais justifier des dommages irréversibles ?
Sur le plan économique, le Ghana est confronté à des pertes importantes dues à l’extraction non réglementée de l’or, ce qui se traduit par un manque à gagner annuel de plus de 2 milliards de dollars. L’empiètement des activités de galamsey dans les régions productrices de cacao a détruit 20 000 hectares de plantations de cacao, compromettant ainsi la production de cacao du Ghana et les marchés mondiaux du chocolat. Le tissu social des communautés touchées est flagrant, avec une augmentation des abandons scolaires et une aggravation de la pauvreté. Malgré les efforts du gouvernement, l’application de la loi reste incohérente, souvent entravée par la corruption et l’ingérence politique. (theguardian.com ; myjoyonline.com).
La question pressante est la suivante : le Ghana peut-il se permettre de détourner le regard de la dévastation silencieuse qui le guette ?
Ressources à risque
L« eau en état de siège : la galamsey au Ghana suscite de graves préoccupations environnementales. La prolifération de ces activités affirme que l’exploitation minière illégale a principalement pollué 60 % des masses d’eau du pays, en particulier dans les régions du sud-ouest où elle est répandue. Néanmoins, l’utilisation de substances nocives comme le mercure et le cyanure dans les processus d’extraction de l’or est souvent déversée directement dans les masses d’eau sans traitement (business-humanrights.org). Outre le fait que le mercure est manifestement impropre à la consommation domestique, il altère l’environnement aquatique, entraînant l’effondrement des chaînes alimentaires et la disparition d’espèces de poissons, qui sont vitales pour la subsistance et l » économie des communautés locales (Faseyi et al., 2022). L’exposition au mercure a été associée à des troubles neurologiques et du développement, en particulier chez les enfants, et les problèmes de qualité de l’eau comme la typhoïde et le choléra augmentent en raison des agents pathogènes (coalitionagainsttyphoid.org). La pollution des sources d’eau a mis à rude épreuve la capacité des installations de traitement de l’eau. La Ghana Water Company Limited (GWCL) doit faire face à une augmentation de ses coûts opérationnels en raison de l’ajout de produits chimiques et de processus de traitement de l’eau contaminée, ce qui entraîne des fermetures temporaires d’usines et perturbe l’approvisionnement en eau des zones urbaines et rurales (Reuters.com). L’agriculture, qui dépend fortement de l’eau propre pour l’irrigation, souffre de la pollution de l’eau qui compromet le rendement des cultures et la qualité des sols. Cette situation menace la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des communautés agricoles. De plus, le déclin des populations de poissons a un impact sur l’industrie de la pêche, entraînant des pertes économiques et du chômage.
Les retombées agricoles : des études menées dans les régions occidentales ont montré que les activités minières ont entraîné une réduction de 15,45 % de l’utilisation des terres agricoles entre 1986 et 2006 (Jnr et al., 2016). Cela est principalement dû à l’érosion et au compactage des sols, ainsi qu’à la contamination des masses d’eau par des produits chimiques dangereux. Cette pollution affecte les systèmes d’irrigation, la qualité de l’eau et les cultures, ce qui présente des risques pour la santé des consommateurs et nuit à la commercialisation des produits agricoles (Emmanuel, Jerry et Dzigbodi, 2018). L’un de ces produits est le cacao, pour lequel ces activités illégales ont perturbé la culture du cacao, directement par la conversion des terres et indirectement lorsque les sources d’eau pour la culture ont été polluées. Le Ghana Cocoa Board signale une baisse de la production de cacao dans les zones fortement touchées, qu’il attribue à la perte de terres arables et à la dégradation de l’environnement (financialtimes.com). Cette situation a des conséquences socio-économiques, car les agriculteurs sont contraints de louer leurs terres aux mineurs, ce qui entraîne une insécurité alimentaire, une perte de moyens de subsistance et une augmentation de la pauvreté. Les activités minières illégales perturbent les structures communautaires, entraînent des problèmes sociaux, des problèmes de santé et une dégradation de l’environnement. Cette situation exacerbe les difficultés économiques auxquelles sont confrontées les communautés dans les domaines de la pêche et de l’élevage.
Le fardeau silencieux – les coûts de santé : L’exposition chronique au mercure provenant des opérations de galamsey est liée à des troubles neurologiques, des lésions rénales et des défauts de développement chez les enfants, tandis que les activités non réglementées entraînent une pollution atmosphérique importante, des affections respiratoires et des éruptions cutanées (Faseyi et al., 2022 ; Ofori et al., 2024). La dégradation de la qualité de l’eau, quant à elle, exacerbe les maladies d’origine hydrique telles que la typhoïde, le choléra et la dysenterie (coalitionagainsttyphoid.org). Ces crises sanitaires liées aux activités minières entraînent une augmentation des dépenses de santé, les ménages des communautés minières dépensant plus que ceux des zones non minières (Magambo et al., 2021). En outre, l’afflux de patients a submergé les établissements de santé locaux, entravé les services essentiels et détourné l’attention d’autres besoins en matière de santé. Une étude systématique réalisée par Arhin et al. en 2025 montre que les polluants miniers ont un impact négatif sur la santé reproductive, entraînant une augmentation de l’infertilité, des fausses couches et des anomalies congénitales. Les perturbations socio-économiques dues aux activités de galamsey contribuent également à des problèmes de santé mentale tels que la dépression et l’anxiété.
Perte du tourisme, des investissements et de l’image du Ghana dans le monde : La galamsey a eu un impact significatif sur le potentiel écotouristique du pays, les perspectives d’investissement étranger et l’image internationale. La déforestation et la pollution dans des zones telles que le district d’Amansie South entravent les activités telles que la navigation de plaisance, l’observation de la faune et de la flore et le tourisme culturel, ce qui dissuade les visiteurs et réduit les recettes (Yeboah, 2025). L’industrie touristique ghanéenne a été entachée par ce scandale minier, qui a suscité des inquiétudes en matière de gouvernance environnementale et sociale. Cette situation a entamé la confiance des investisseurs et menacé la réputation mondiale du pays en tant que partenaire du développement durable (Financial Times). Si rien n’est fait, la persistance de la galamsey ne fera pas qu’éroder davantage la confiance des investisseurs, mais elle coûtera aussi au Ghana des milliards en termes de pertes commerciales, de recettes touristiques et de bonne volonté internationale.
Un défi pour les institutions juridiques du Ghana : Le Galamsey a mis en évidence les faiblesses des systèmes de gouvernance et d’application de la loi du pays. Malgré des cadres juridiques solides, notamment la loi sur les minéraux et l’exploitation minière de 2006 (loi 703) et la loi sur l’agence de protection de l’environnement de 1994, qui établissent des lignes directrices pour des pratiques minières durables et la protection de l’environnement, l’application de la loi fait défaut en raison d’un manque de financement, d’effectifs limités et d’interférences politiques (Zimpah, 2024). Des initiatives telles que l’opération Vanguard ont connu un succès temporaire, tandis que la corruption et les intérêts politiques locaux contribuent à une culture de l’impunité (ghanaweb.com). Pour y remédier, il faut renforcer les capacités institutionnelles, s’attaquer à la corruption, proposer des alternatives économiques et faire preuve d’une forte volonté politique pour poursuivre les délinquants de haut niveau.
Ce que le Ghana peut faire : Les voies de la reconquête de l’avenir
La formalisation des petites exploitations minières constitue une étape essentielle dans la lutte contre le galamsey. En intégrant ces mineurs dans le cadre juridique, le gouvernement peut contrôler les activités, faire respecter les normes environnementales et percevoir des revenus. La formalisation implique de simplifier les procédures d’octroi de licences, de fournir une formation technique et de garantir l’accès aux sites miniers légaux. Cette approche permet non seulement de lutter contre les activités illégales, mais aussi de promouvoir des pratiques minières responsables.
Pour que les restrictions minières soient appliquées efficacement, il faut des institutions fortes, dotées d’un financement et d’une indépendance suffisants. Il est essentiel de renforcer les capacités des agences de régulation telles que l’Agence de protection de l’environnement et la Commission des minéraux. Cela implique d’instaurer une ouverture opérationnelle, d’améliorer les systèmes de contrôle et de former le personnel. En outre, la protection de ces organisations contre les ingérences politiques peut accroître leur capacité à mettre un terme à l’exploitation minière illicite.
Il est essentiel d’inclure les populations locales dans la lutte contre la galamsey. La sensibilisation aux effets négatifs de l’exploitation minière illicite sur l’environnement et la santé humaine peut être renforcée par des initiatives éducatives. Dans le même temps, l’offre d’autres formes de revenus, notamment l’aquaculture, l’agriculture durable et la formation professionnelle, peut réduire la dépendance à l’égard de l’exploitation minière illicite. La participation de la communauté aux procédures de prise de décision favorise également le sentiment de responsabilité et d’appropriation de la préservation de l’environnement.
La technologie et l’analyse des données peuvent améliorer la surveillance et la réglementation des activités minières, en permettant un suivi en temps réel et des interventions ciblées. Il est essentiel d’investir dans les infrastructures et de former le personnel. La collaboration internationale et la cohérence des politiques sont essentielles pour traiter la question transnationale de l’exploitation minière de l’or, en alignant les politiques nationales sur les normes internationales en matière de protection de l’environnement et de droits de l’homme. La vente récente de la mine d’or Akyem de Newmont à Zijin serait peut-être un bon début.
Conclusion
Le Ghana se trouve à un carrefour critique où le coût de l’inaction face à la galamsey pourrait dépasser de loin tout gain économique à court terme. Les conséquences environnementales, sociales et économiques sont déjà en train d’effriter le tissu des communautés, de saper le développement national et de ternir la réputation mondiale du pays. Des interventions communautaires urgentes, soutenues et inclusives sont nécessaires, qu’il s’agisse de formaliser l’exploitation minière à petite échelle, de renforcer les institutions ou d’autonomiser les communautés. En donnant la priorité à la durabilité à long terme plutôt qu’au profit à court terme, le Ghana peut se réapproprier son avenir et sauvegarder son patrimoine naturel pour les générations futures.
Références
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Adombila, M. A. (2025, 23 avril). Ghana. Reuters. https://www.reuters.com/markets/commodities/ghanas-wildcat-gold-mining-booms-poisoning-people-nature-2024-10-07/
Arhin, S. K., Barnes, P., Arhin, I. K., & Owusu-Nyarko, B. (2025). Effet du « Galamsey » sur la fertilité humaine : A Systematic Review. Health Science Reports, 8(3), e70602.
Awewomom, J., Benyade, B. K., Osei, F. E., Azanu, D., Opoku, F., Sackey, L. N. et Akoto, O. (2024). A review of health hazards associated with exposure to galamsey-related pollutants (Examen des risques pour la santé liés à l’exposition aux polluants de la galamsey). Health Sciences Investigations Journal, 5(2), 726-734.
Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme. (2025, 23 avril). Ghana : 60% of water bodies polluted due to illegal mining and other activities, say authorities. https://www.business-humanrights.org/en/latest-news/ghana-60-of-water-bodies-polluted-due-to-illegal-mining-and-other-activities-say-authorities/
Emmanuel, A. Y., Jerry, C. S. et Dzigbodi, D. A. (2018). Examen des impacts environnementaux et sanitaires de l’exploitation minière au Ghana. Journal of Health and Pollution, 8(17), 43-52.
Faseyi, C. A., Miyittah, M. K., Sowunmi, A. A., & Yafetto, L. (2022). Water quality and health risk assessments of illegal gold mining-impacted estuaries in Ghana (Évaluation de la qualité de l’eau et des risques pour la santé des estuaires touchés par l’extraction illégale d’or au Ghana). Marine Pollution Bulletin, 185, 114277.
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Jnr, S. D., Cieem, G., Ayensu-Ntim, A., Twumasi-Ankrah, B., & Barimah, P. T. (2016). Effets de la perte de terres agricoles due à l’exploitation aurifère à grande échelle sur l’agriculture au Ghana : le cas de la région occidentale. British Journal of Research, 2(6).
Magambo, I., Dikgang, J., Gelo, D. et Tregenna, F. (2021). Exposition à la pollution des mines d’or, effets sur la santé et dépenses de santé privées en Tanzanie.
Nti, E. K., Cobbina, S. J., Attafuah, E. E., Senanu, L. D., Amenyeku, G., Gyan, M. A., … & Safo, A. R. (2023). Contrôle et revitalisation de la pollution de l’eau à l’aide de technologies avancées : Uncovering artificial intelligence options towards environmental health protection, sustainability and water security. Heliyon, 9(7).
The Guardian. (2025, 23 avril). Rivières polluées, terres agricoles déracinées et impôts perdus : Ghana counts cost of illegal gold mining boom. https://www.theguardian.com/world/2024/nov/25/polluted-rivers-taxes-ghana-illegal-gold-mining-boom
Tuor, V. N. (2023, 17 janvier). L’exploitation minière illégale au Ghana : l’impact négatif sur l’eau, l’assainissement et l’hygiène, la typhoïde et d’autres maladies infectieuses. Coalition contre la typhoïde. https://www.coalitionagainsttyphoid.org/illegal-mining-in-ghana-the-negative-impact-on-wash-typhoid-and-other-infectious-diseases/
Yeboah, R. (2025). Environmental Impacts of Illegal Gold Mining and Its Threat to Ecotourism Development in the Amansie South District. International Journal of Hospitality, 9(1), 40-48.
Ziblim, C. W. (2025, 23 avril). Au-delà des chiffres : L ‘évaluation de la galamsey. MyJoyOnline. https://www.myjoyonline.com/beyond-the-numbers-assessing-galamseys-impact/